Point de vue d’adhérent : loi d’orientation des mobilité (LOM)
Loi d’Orientation des Mobilités (LOM)– Episode 1 : un rendez-vous manqué pour la transition écologique et le développement local ?
Contribution de Stéphane Loukianoff – adhérent de l’Unadel
Alors qu’un couvre-feu national est en vigueur depuis des mois, alors que nos déplacements journaliers sont désormais contenus dans un rayon de 10 km autour de notre domicile, qui devinerait que l’application d’une loi importante sur les mobilités est actuellement en débat dans les ¾ de notre pays ? Combien de nos concitoyens qui habitent en milieu rural savent aujourd’hui qu’un enjeu essentiel de leur quotidien est actuellement discuté dans leur territoire ?
La Loi d’Orientation des Mobilités du 24 décembre 2019 (LOM) a en effet donné aux communautés de communes jusqu’au 31 mars 2021 pour qu’elles se décident – ou non – à prendre la compétence « mobilités ». La LOM passe de la notion de « transport » à celle de « mobilité », en englobant les services de transport régulier de personnes, le transport scolaire, le transport à la demande, les mobilités actives, partagées et solidaires. Elle vise à couvrir l’ensemble du territoire national par une Autorité Organisatrice des Mobilités locales (AOML), et propose de donner au niveau local, intercommunal de préférence, la possibilité de décider de sa propre politique de mobilités, de ses services et de ses projets dans ce domaine.
Si une communauté de communes ne prend pas cette compétence, alors, la Région continuera à l’exercer. Si par contre, l’intercommunalité prend la compétence, elle pourra alors déterminer si elle veut la gérer en totalité ou bien déléguer tout ou partie de celle-ci à d’autres entités, par exemple à un syndicat des mobilités existant au niveau d’une aire urbaine à proximité ou encore transférer les transports scolaires à la Région et n’agir par elle-même que sur les mobilités dites « actives » (ex : vélo) et « partagées » (ex :co-voiturage).
Sortir du « tout voiture » : un enjeu grandissant dans les territoires ruraux
La LOM a le mérite de prendre en compte une véritable évolution sociétale. Car les territoires ruraux ont vu se développer ces dernières années une diversité d’initiatives publiques et/ou privées de mobilités qui témoignent de l’appétence grandissante de la société locale pour sortir du « tout voiture » et notamment de « l’auto-solisme ». Et ce n’est pas l’exode urbain à l’œuvre qui risque de remettre en cause cette tendance lourde.
Par exemple, dans le territoire où j’habite, le véhicule individuel, tient toujours une large place : pas moins de 6 300 véhicules pour 10 500 habitants. Ce sont près de 19,3 millions d’euros qui sont dépensés chaque année par les familles qui se déplacent dans le territoire, ce qui représente 34% des consommations énergétiques locales. Toutefois, l’offre de mobilité se développe progressivement ces dernières années.
Par exemple, un réseau bénévole de petites annonces, qui fonctionne par SMS, diffuse aux habitants de nombreuses offres et demandes de covoiturage.
L’intercommunalité a mis à disposition des habitants, un parc de 20 Vélos à Assistance Electrique (VAE), et ce service est plébiscité par la population. Dans ce territoire de montagne, de nombreux habitants utilisent ces VAE pour faire leurs courses ou aller au travail. Grâce à ce dispositif, ils se familiarisent durant quelques mois avec le vélo électrique et sont de plus en plus nombreux à en acheter un quelque temps après.
Et pour faciliter les déplacements des personnes pour qui l’usage d’un véhicule personnel est hors de prix, l’intercommunalité mobilise désormais une partie des VAE pour les personnes privées d’emploi.
L’autopartage s’est également développé avec la mise en place de deux véhicules CITIZ à l’initiative d’un groupe d’habitants. De plus, après de longues années de mobilisations citoyennes, la ligne de chemin de fer qui traverse notre territoire a été enfin sauvegardée et des projets de développement de l’intermodalité au niveau des gares pourraient bientôt émerger. Bref, les projets foisonnent et sont bien loin de ne concerner que les services « lourds », tels que le transport scolaire et les lignes de bus régulières.
Ainsi, comme dans les aires urbaines, nombre d’habitants des territoires ruraux souhaite renoncer à la voiture comme seule modalité pratique de déplacement, eu égard à la part croissante qu’elle prend dans le budget familial. Ils attendent donc de leurs représentants locaux, nouvellement élus, qu’ils se saisissent de la LOM pour ne pas priver leur territoire de leviers d’actions de plus en plus diversifiés et qui relèvent d’enjeux tant environnementaux que socio-économiques.
Les communautés de communes prises dans « un effet ciseaux »
Toutefois, nombre de communautés de communes ne se sentent guère outillées pour gérer à elles seules les transports scolaires ou le transport à la demande sur leur propre ressort territorial. Si bien que, souvent, la prise de compétence inquiète fortement les élus locaux : comment le territoire pourrait-il financer ces nouveaux services alors qu’il cherche déjà à rééquilibrer un budget mis à mal ces dernières années par plusieurs transferts de compétences plus imposés que désirés et par la crise sanitaire et économique qui sévit ?
Certes, un transfert de compétence doit être accompagné de l’ensemble des moyens humains et financiers concernés, mais le montant de ces ressources financières transférées est généralement fixé l’année du transfert et n’évolue plus ensuite, contrairement aux dépenses qui tendent à s’accroître de façon quasi mécanique chaque année. De plus, si l’Etat « décentralise » les compétences et « territorialise » les politiques publiques afin de donner plus de moyens d’agir à l’échelon local, dans le même temps, il réduit très violemment les leviers de la fiscalité locale. Paradoxalement, le législateur donne donc de plus en plus de responsabilités à l’échelon local et prive en même temps ce dernier de sa capacité à financer des actions dans ces nouveaux champs de compétences ! Les communautés de communes sont donc prises dans « un effet ciseaux » qui les paralyse plus qu’il ne les pousse aux initiatives. Ce qui n’est pas sans poser de graves problèmes dans un contexte de nécessaire accélération de la transition écologique et de crise économique. Bien évidemment, les décideurs locaux en ont de plus en plus conscience.
Poussés par une certaine prudence gestionnaire, assez compréhensible dans ce contexte économique, de nombreuses intercommunalités se sont donc prononcées au cours du mois de mars contre cette prise de compétence et laisseront leur collectivité régionale la gérer pour leur territoire à l’avenir. Car, en dehors de quelques cas de figures bien précis, la loi considère bien cette décision comme « irréversible ».
Et la démocratie locale dans tout ça ?
Malgré la crise sanitaire et l’impossibilité technique d’organiser des réunions publiques en présentiel, le Gouvernement n’a pas jugé utile de reporter au-delà du 31 mars 2021 la date limite de décision des communautés de communes. Il a ainsi mis les délégués communautaires dans une fâcheuse posture vis-à-vis de leurs concitoyens. Certains pourraient considérer que les conseils communautaires qui ont décidé ces derniers jours de laisser cette compétence à la Région ont aussi privé leur territoire d’une concertation plus à la hauteur des enjeux…
D’autres communautés de communes ont néanmoins fait le choix inverse et ont voté pour la prise de compétence. Tout du moins, en apparence. Car, dans ce contexte, comment savoir si ce vote traduit une volonté de se saisir pleinement du levier « mobilités » ou bien s’il exprime plutôt la volonté de permettre dans un second temps aux conseils municipaux, aux habitants et aux associations de simplement avoir la possibilité d’en débattre ? Rappelons en effet que, pour qu’un transfert de compétences soit effectif à l’échelon intercommunal, il doit être validé par les communes, celles-ci ayant alors trois mois pour se prononcer. Mais le contexte sanitaire n’est guère plus favorable aux débats publics actuellement qu’au début de l’année : les nouveaux élus et les associations locales trouveront ils, dans les prochaines semaines, les énergies et les modalités pratiques adaptées à un tel enjeu ?
En tout état de cause, de nombreuses questions restent encore en suspens et seront sans doute abordées dans les futurs débats locaux. Mais il est clair que les conséquences des décisions qui seront prises dans les prochains mois sont potentiellement nombreuses pour l’échelon local mais aussi pour l’échelon régional : elles pourraient bien marquer profondément les conditions d’exercice du mandat des élus locaux, mais aussi modifier parfois l’organisation territoriale (les relations ville-campagne) et permettre dans les territoires l’émergence de dynamiques nouvelles dans le champ de la transition écologique et du développement local. C’est pourquoi, nous reviendrons sur ces différents sujets dans quelques mois, dans un prochain article, « La LOM, épisode 2 ».
Stéphane Loukianoff – adhérent de l’Unadel
Les livres de l’Unadel : “Vous avez dit…”
Vous avez dit développement local ? (TOME 1) Vous avez dit…territoires, intercommunalités, développement local (TOME 2)
Vous avez dit… territoires, intercommunalités, développement local
Disponible depuis le 08 janvier 2021 !
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Le développement local, accélérateur de changement
Une histoire et un savoir à partager pour construire demain
Vous avez dit … territoires, intercommualités, développement local : Ce livre est le fruit d’un travail collectif et coopératif initié par l’Unadel (Union Nationale des Acteurs du Développement Local). Il retrace l’actualité récente du développement local et des collectivités locales. Il se penche notamment sur les bouleversements apportés par les lois sur l’intercommunalité depuis 1992,et sur la place et le devenir du développement local.
Il sera particulièrement utile aux acteurs locaux et notamment aux nouveaux élus, confrontés à la crise sanitaire singulière de 2020 et à ses conséquences, à des situations financières parfois délicates, à des exigences citoyennes de plus en plus fortes… Ce livre est conçu comme un outil au service des territoires en charge de construire une voie prometteuse de changements et d’innovations dans les transitions, pour que le monde d’après puisse exister pour les générations à venir. Il s’inscrit évidemment dans la pleine continuité du livre Vous avez dit Développement local.
Et pour rappel le TOME 1 :
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Des hommes et des territoires
Le développement local, accélérateur de changement
Une histoire et un savoir à partager pour construire demain
Ce livre est le fruit d’un travail collectif et coopératif initié par l’Unadel (Union Nationale des Acteurs du Développement Local). L’importance du sujet et de la matière est vite apparue considérable. Il fallait une mise en récit d’un processus et d’une démarche pour suivre le fil conducteur de ce qui constitue un premier volet d’une histoire vécue et incarnée ; c’est le sens de cette œuvre collectivement engagée et des développements qui suivront la publication de cet ouvrage.
Ce livre est aussi un recueil de clefs pour comprendre et se projeter dans un monde en profonde mutation. C’est un socle de transmission de savoirs. Écrit à plusieurs mains autour du métier à tisser de Georges Gontcharoff, dont la plume est toujours aussi précise et alerte, il est mis à disposition des étudiants, des chercheurs et tous les observateurs avisés de la résilience des hommes et des territoires ; il s’adresse également aux militants et à tous ceux qui, dans leurs responsabilités respectives, œuvrent pour une société plus juste, plus humaine et plus désirable.
Le local, avec ses espaces de rencontres et de co-construction, pourrait bien réenchanter une République des territoires de projet, souvent malmenés par les différentes étapes d’une décentralisation inachevée et les réorganisations successives.
Parce qu’ils révèlent le pouvoir d’agir issu de l’initiative individuelle et collective des citoyens et d’élus créatifs et visionnaires, les morceaux choisis de ce livre peuvent agir comme une boussole. Puissent-ils servir de balises pour l’engagement et la participation de chacun à prendre sa part dans l’œuvre de transformation globale du monde.
Claude Grivel, Président de l’Unadel
[Appel] Fabriquons une relance en transition !
Préparons et démontrons la force de frappe des territoires
pour sauver l’économie et la planète! “
De multiples tribunes formalisant jour après jour une attente de transformation du monde de l’après-Covid19. Seront-elles entendues ?
Le moment est historique !
L’Union nationale des acteurs du développement local ( UNADEL ) sous l’égide de La Fabrique des Transitions soutient aujourd’hui l’appel “Fabriquons une relance en transitions” en lien avec la tribune #nouslespremiers .
Soyons acteurs et démontrons que nous avons de véritables projets de transition, ancrés dans les territoires , au plus près des français, porteurs d’utilité sociale , générateurs d’emplois …. Des projets constitutifs d’une Transition puissante , inclusive et démocratique !
POUR EN SAVOIR PLUS, CLIQUEZ ICI !
Et retrouvez la tribune Une Fabrique des Transitions territoriales pour finir avec le sentiment impuissance
La formation en ligne “Territoires et développements : changeons d’époque” revient dès aujourd’hui !
En raison de la situation exceptionnelle liée à la crise sanitaire, la troisième session du MOOC (formation en ligne) sur le développement local intitulé “Territoires et développements : changeons d’époque” est ouverte dès le 23 mars et jusqu’à mi-juillet (inscription jusqu’au 29 juin)
Nous avons ouvert l’intégralité des séances afin que vous puissiez suivre le MOOC à votre rythme.
Notion à la fois ancienne et fortement questionnée par la période actuelle, le développement local impacte directement les sujets du quotidien : l’alimentation, les mobilités, l’éducation, l’économie ou la santé, mais aussi les questions de participation. Cette notion est pourtant bousculée par un contexte de mutations multiples et les transitions écologiques, administratives ou démocratiques que nous traversons ou cherchons à mettre en œuvre appellent d’autres façons de penser et de faire le développement des territoires.
Il s’agira au cours des quatre séances de ce MOOC, publiées sur la plateforme FunMooc, d’explorer les notions de Développement et de Territoire pour aller vers l’idée que le bien commun d’un territoire incarne l’enjeu de son propre développement. Les enseignements dispensés par des intervenants professionnels du développement des territoires permettront à l’apprenant de construire une vision transversale et complémentaire de ce que pourrait être le développement des territoires à l’avenir.
Pour accéder aux cours :
Inscription (jusqu’au 29 juin)
Pourquoi une formation en ligne sur le développement des territoires ?
Le développement des territoires est une notion à la fois ancienne et fortement questionnée par la période actuelle. De plus, le développement de chaque territoire impacte directement les sujets du quotidien : l’alimentation, les mobilités, l’éducation, l’économie ou la santé… mais aussi les questions de participation.
Qui prend part à quel développement ? Dans quel but ?
Ce croisement entre objet du quotidien et question participative, est actuellement bousculé par un contexte de mutations multiples. Les transitions écologiques, administratives ou démocratiques que nous traversons ou cherchons à mettre en œuvre, appellent d’autres façons de penser et de faire le développement des territoires.
Tout en prenant en compte les singularités de chaque territoire, apparaissent aussi des points communs :
- des constats partagés : une distance entre les institutions publiques et les citoyens, et parallèlement l’émergence de multiples initiatives plutôt locales.
- des objectifs communs : faire autrement et faire ensemble pour assurer un développement durable partout et pour tous.
Cette formation en ligne débute par une exploration des notions de Développement et de Territoire pour aller vers l’idée que le bien commun d’un territoire incarne l’enjeu de son propre développement.
Une grande diversité d’acteurs a contribué à cette formation afin de construire une vision transverse et complémentaire de ce que pourrait être le développement de nos territoires à l’avenir. Ainsi des techniciens, des associatifs, des chercheurs et des formateurs proposeront leur travaux et leurs expériences pour vous apporter des pistes de réflexions et d’actions concrètes pour expérimenter et s’inspirer les uns des autres.
Quelles ressources financières nouvelles pour le développement des territoires ?
Ces 1ères Rencontres se tiendront le 27 Février 2020, dans les locaux de BPI France, au 8 boulevard Haussmann, à Paris 9ème (Métro : Richelieu Drouot – lignes 8 et 9).
De nouvelles solutions financières, axées sur la valorisation des ressources locales et sur l’activation des échanges entre acteurs locaux, permettent de mieux répondre au défi économique, social, environnemental et démocratique des territoires.
Les aspirations de nos contemporains et la qualité des solutions techniques invitent à une diffusion fortement accrue de ces solutions. Et le territoire est un cadre pertinent pour leur déploiement éclairé, efficace, et efficient, d’une part, parce que ses responsabilités s’accroissent et, d’autre part, parce que la proximité favorise la sensibilisation et la mise en action des acteurs (entreprises, habitants, institutions, etc.).
“Vous avez dit développement local ?” tome 2
Le développement local est une matière vivante… nous vous proposons un deuxième volet (encore provisoire) à notre premier tome “Vous avez-dit développement local ?”. Utile, nous le pensons, pour les équipes candidates aux prochaines municipales et mais aussi à celles et ceux qui dès maintenant et après mars 2020 souhaiteront s’engager dans leur territoire.
Vous y trouverez l’évolution de l’organisation des territoires apportée par les lois sur l’intercommunalité depuis 1992, la poursuite de la Réforme Territoriale depuis 2010 et l’irruption du développement durable, des transitions, de nouvelles gouvernances et de coopérations entre acteurs… les évolutions du développement local et du développement social local….
120 pages d’analyses et de témoignages à découvrir dès maintenant !
Les acteurs de la politique de la ville investissent le développement économique…et les transitions
La Loi du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine a contribué à mettre l’accent sur le développement économique comme axe central des contrats de ville. Les centres de ressources de la politique de la ville sont ainsi amenés très régulièrement à proposer des temps de réflexion et de partage d’expérience sur ce sujet.
A noter également, l’émergence d’une réflexion sur le lien avec les transitions dans le cadre d’un cycle de journées en Rhône Alpes.
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POP-UP dev éco le 16 octobre à la Plaine Images, Tourcoing,
Stands, débats, visites et ateliers : l’objectif est de faire coproduire le monde des entreprises, les professionnels de la Politique de la ville et du développement économique, les citoyens et entrepreneurs. Six parcours thématiques sont proposés pour inspirer les territoires et faire germer de nouvelles solutions autour de l’industrie de demain, l’émergence de nouveaux projets entrepreneuriaux, les lieux totems de l’économie et de l’innovation dans les quartiers,…)
Programme et inscriptions : http://www.irev.fr/thematiques/developpement-economique/pop-dev-eco-16-octobre
Contact : contact@irev.fr ou 03.20.25.10.69
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Labo Cités propose un cycle de qualification et d’échanges de 4 journées intitulées « Transition écologique et solidaire des quartiers populaires »
La 1ère journée “Transition écologique et développement économique dans les quartiers populaires” aura lieu le 5 novembre 2019 à Grenoble.
Aujourd’hui, la transition écologique n’est plus considérée comme une option. Elle appelle de profonds changements de nos modes de vie, de production et de consommation. Elle a ainsi des répercussions économiques et sociales majeures, qui ne seront acceptées qu’à travers davantage de solidarités. Comment ces évolutions impactent-elles la stratégie de développement économique des quartiers populaires ? Peuvent-ils être des territoires d’expérimentation de nouveaux modèles économiques ? Telles seront les questions abordées lors de cette journée.
Les prochaines journées :
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Économie circulaire et quartiers populaires – 10 ou 12 Décembre 2019 à Vaulx en Velin
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Politique de la ville et ESS : coopérer pour la transition écologique – février 2020,
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Transition écologique des quartiers populaires : quelle participation des habitants ? Avril 2020
Programme et inscription : https://www.labo-cites.org/rencontre/transition-ecologique-et-developpement-economique-dans-les-quartiers-populaires-le-mardi
Grand Est #3 / De la laine pour des matelas, des emplois pour la Lorraine
L’entreprise à but d’emploi De laine en rêves, installée en Meurthe-et-Moselle, valorise le travail des éleveurs et emploie six personnes.
Article de Sylvain Adam publié dans la revue Transrural initiatives n°475 / juillet-août 2019
Lire et télécharger cet article au format pdf
Matelas, couettes, oreillers, coussins… Depuis le printemps 2018, De laine en rêves transforme la laine de moutons élevés en Lorraine en produits de literie. L’entreprise est installée sur la Communauté de communes du Pays de Colombey et du Sud Toulois, un territoire rural de 11 500 habitants1. Refusant de considérer la privation d’emploi comme une fatalité, le territoire s’est porté candidat pour l’expérimentation nationale Territoires zéro chômeur de longue durée (cf. TRI n°454). En 2016, il a été retenu comme neuf autres territoires en France et accueille aujourd’hui deux entreprises à but d’emploi (EBE) : la Fabrique à Bulligny et De laines en rêves à Allain.
Cette dernière est désormais une Société coopérative d’intérêt collectif (SCIC) où six anciens chômeurs de longue durée travaillent : Basile, Cosette et Catherine en tant qu’agents de production, Claude pour le secrétariat et la partie commerciale, Djefferson pour un service de tonte de moutons et Philippe, gérant et lui-même ancien tondeur avec trente ans d’expérience. Comme dans les autres EBE, tous sont employés en CDI et payés au SMIC. La réaffectation des coûts et des manques à gagner liés la privation durable d’emploi (environ 18 000 € par personne et par an) assure le versement des salaires et une activité répondant aux besoins du territoire.
Valoriser la laine des élevages de Lorraine
Une trentaine de matelas sortent chaque mois de l’entreprise qui propose trois types de conforts – souple, mi-ferme, ferme – pour ces matelas faits main, anti-bactériens, anti-acariens et durables, vendus environ 1 000 € pièce. Les sommiers et la literie sont fabriqués en partenariat avec la Fabrique, l’autre EBE du territoire, où travaillent des menuisiers et ébénistes.
Grâce à des reportages, à la participation à des salons locaux et aux réseaux sociaux et, bien sûr, au bouche-à-oreille, De laine en rêves se fait connaître et les commandes affluent. Si bien que le gérant souhaiterait ouvrir prochainement un site de vente.
Valoriser localement la laine semble aller de soi mais, avant la création de l’EBE, elle était bradée à 40 ou 50 centimes le kilo et majoritairement exportée en Asie. Comment lui redonner de la valeur et assurer quelques revenus aux éleveurs – qui ne parvenaient même pas à couvrir les frais de tonte –, tout en étant attentif au principe de non concurrence avec les entreprises locales ? L’idée de produire des matelas est venue suite à une étude réalisée par la communauté de communes et une étudiante de l’Ensaia2. Contrairement au textile, produire des matelas nécessite une laine gonflante et un matériel relativement limité. Aujourd’hui, treize éleveurs de la région – avec des cheptels allant de 25 à 1 000 moutons – sont intégrés à la SCIC qui leur achète la laine à 1,50 € le kilo.
Maîtriser l’ensemble du processus
Entre la tonte et la transformation de la laine, il y a une étape essentielle : le lavage. Comme il n’existe pas actuellement de station dans la région, Philippe fait lui-même l’aller-retour à Verviers en Belgique où 100 tonnes de laine sont lavées tous les jours. Pour ancrer l’ensemble de la chaîne de production localement, l’idée est de créer une station de lavage à proximité, plus petite que celle de Verviers et surtout plus « propre ». Philippe espère que ce projet verra le jour dès la fin de l’année.
Sylvain Adam (Unadel)
Plus d’infos : www.de-laine-en-reves.fr et www.facebook.com/De-laine-en-r%C3%AAves-167319087455217.
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Pour en savoir plus sur cette communauté de commune pionnière du développement local, lire un entretien avec son directeur Xavier Loppinet sur : https://unadel.org/grand-est-2-rencontre-avec-avec-xavier-loppinet-colombey-les-belles-et-sud-toulois/
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École nationale supérieure d’agronomie et des industries alimentaires de Nancy.
Développement local en milieu rural : expérience et analyse des évolutions à l’œuvre
Au cours des 4 dernières années, j’ai occupé successivement les postes de directeur d’un Pays de 11 000 habitants dans un territoire de très faible densité, de secrétaire général d’une commune (un centre bourg de 1000 habitants), puis celui de directeur du pôle développement d’une intercommunalité de 10 000 habitants dans un territoire semi-rural situé à proximité d’une métropole. Ainsi, comme tant d’autres agents de développement, je me suis donc retrouvé “aux premières loges” pour observer localement certaines des conséquences des recompositions territoriales issues de la finalisation de la carte intercommunale, de la montée en puissance des métropoles, de l’arrêt brutal de politiques régionales en faveur des pays, ou encore du naufrage administratif – en cours – du programme Leader.
Un écosystème du développement local en milieu rural désormais très appauvri et très fragilisé
En 2015 et 2016, les acteurs du développement local avaient pu observer que les nouveaux périmètres des intercommunalités, définis par L’État, ne correspondaient que très rarement aux attentes des élus et des habitants et incarnaient une pratique à complet rebours de l’esprit de la décentralisation (les volontés communales étant totalement ignorées), comme de celui de la coopération intercommunale qui était, jusqu’alors, un acte volontaire.
Dans le territoire du Pays où je travaillais alors, j’ai vu la mise en place d’une nouvelle intercommunalité XXL en lieu et place du Pays ; j’ai vu l’incompréhension des habitants, le désarrois des élus communautaires, et les craintes de ces derniers de perdre à la fois le pilotage réel de cette nouvelle structure au profit d’une ingénierie locale considérée pléthorique, et de voir s’amplifier rapidement le décrochage des élus municipaux et donc des communes. J’ai vu cette intercommunalité naissante à la fois dotée d’un grand périmètre (un quart du département) et de ressources propres extrêmement faibles (territoire rural résidentiel de très faible densité) s’interroger sur ses capacités immédiates à mettre en œuvre des compétences très disparates héritées de 5 EPCI très différents. J’ai observé aussi l’interrogation profonde de ses dirigeants élus et professionnels vis à vis des nouveaux transferts de compétences (GEMAPI et LOM par exemple) qui leur étaient annoncés par le législateur.
Dans ce territoire, le Pays était sous statut associatif et organisait les coopérations entre 5 intercommunalités ainsi que le développement global du territoire, en lien avec la société civile. Mais, entre 2015 et 2017, “l’éléphant-législateur” suivi de près par un nouvel exécutif régional de PACA totalement ignorant du développement local, est venu grossièrement saccager- il n’y a pas d’autres mots – les dynamiques locales et méthodes de développement qui avaient été longuement construites par les acteurs locaux (élus, associations, conseil de développement, agents de développement). Ce territoire s’en remettra sans doute, mais on ne peut dire dans combien d’années et surtout avec quels moyens humains et financiers mobilisés. La nature même des opérations de développement qui y seront réalisées dans les prochaines années sera, de toute façon, bien différente de celle des opérations qui auraient eu lieu si l’écosystème complet du développement local n’y avait été mis à terre. Et cette question est la même dans la région où j’exerce aujourd’hui.
Dans ces deux régions, les nouveaux exécutifs régionaux ont stoppé leurs aides financières du jour au lendemain, non seulement aux Pays, mais aussi à un grand nombre d’acteurs associatifs des secteurs culturel, environnemental, et de l’économie solidaire, qui étaient ancrés localement, parfois depuis les années 90, et qui étaient bien souvent des acteurs clefs de l’innovation économique et sociale comme de la transition écologique et énergétique. Avant cet « effet ciseau », l’écosystème du développement local en milieu rural reposait en effet sur le triptyque intercommunalité/communes/associations, soutenu financièrement par les Régions, parfois par les Départements et secondairement par l’État et l’Europe.
Dans cet écosystème, les Pays jouaient, du fait de leur mode de gouvernance pluri-acteurs, de leur souplesse structurelle et de l’absence de compétences propres (au sens institutionnel), un rôle fondamental de liant (outil de dialogue), d’ensemblier (outil de coopération et de participation) et d’innovation (au sens de la mise en place de services et d’actions adaptés aux besoins locaux). Je crois que ce sont là des fonctions essentielles du développement local, et qu’il faut prendre la mesure de la qualité des actions de développement que cet écosystème permettait de réaliser, de l’état de la situation actuelle et donc des enjeux d’une reconstruction, probablement différente, du système du développement local dans ce nouveau contexte. Dépouillés de ces précieux outils, les territoires ruraux de ces deux régions (et sans doute ailleurs en France) se retrouvent en effet avec un écosystème du développement local, non seulement très appauvri, mais également très fragilisé et davantage segmenté qu’il ne l’était il y a 3 ans.
Bien qu’il soit doté de capacités de résilience conséquentes, le milieu associatif est très affaibli. Et la décision de réduire drastiquement les emplois aidés prise il y a 1 an par Gouvernement en a placé un grand nombre en situation de survie, voire en état purement végétatif. L’emploi associatif dans ces régions est donc en crise profonde, et l’on sait les différences énormes que la présence ou non de personnel salarié peut avoir dans une association que ce soient en termes de dynamique interne ou d’actions réalisées. Alors que les enjeux sociétaux sont de premier ordre, la capacité d’agir, le pouvoir de transformation – on l’appellera comme on voudra – du milieu associatif, ne repose quasiment plus que sur des dynamiques bénévoles dans les territoires ruraux de ces deux régions. Pour compléter ce tableau, j’ajoute que « l’état de santé » du bloc communal n’est guère plus rassurant, tout au moins en milieu rural, et plus particulièrement le niveau communal. Vous l’avez probablement tous lus dans différents médias cet automne, le nombre d’élus communaux, et surtout de maires, ne souhaitant pas se représenter aux municipales est en très forte augmentation. Et le nombre de maires démissionnaires au cours de ce mandat l’est aussi. Il faut dire que ce bénévolat citoyen a aussi de vraies raisons d’être en crise. Les transferts de compétences du niveau communal au niveau intercommunal ont progressivement vidé les communes de leurs fonctions locales et donc, les élus municipaux de leur capacité à agir sur le quotidien, ce qui fondait leur utilité et leur motivation. De plus, non seulement l’intercommunalité a « aspiré » de plus en plus de compétences communales mais elle s’est brutalement éloignée géographiquement avec la création, subie, des communautés de communes XXL.
Vers un retour à l’intercommunalité de gestion
Alors l’intercommunalité est- elle pour autant toute puissante ? Ou tout au moins, est-elle devenue l’acteur majeur du développement territorial en milieu rural ? Sur le plan institutionnel, cela semble évident. Même les parcs naturels régionaux doivent aujourd’hui « faire feu de tout bois » pour ne pas être remis en question par cette forte évolution de l’organisation territoriale. Mais, je crois que dans le contexte actuel des deux régions concernées, voire au-delà, nous devons plutôt nous interroger sur la capacité réelle de cette intercommunalité rurale du 21ème siècle à être un véritable acteur du développement territorial, c’est-à-dire sur les moyens qu’elle peut – ou non – mobiliser, et par voie de conséquence, sur la nature du développement qu’elle peut produire. Car, comme je l’ai évoqué plus haut, les fusions récentes et les transferts de compétences à répétition de ces dernières années (par « le haut » et par « le bas ») obligent les communautés de communes à une adaptation réglementaire permanente. Elles ont les plus grandes difficultés à conserver la moindre vision stratégique dans ce rythme de de transformations effréné.
D’ailleurs, pour les intercommunalités qui s’en étaient dotées, le projet de territoire est depuis longtemps jeté aux oubliettes. Et surtout, comme pour bon nombre de communes, le principal souci des communautés de communes rurales est désormais de ne pas sombrer financièrement, tant les lourds transferts de compétences, peu compensés en ressources, s’accumulent, et les obligations de gérer de nouveaux et coûteux services se multiplient. Les intercommunalités rurales que je connais sont donc exsangues, leur capacité à porter des investissements se réduit fortement, et leur capacité à porter des actions de développement diminue encore plus vite.
Désormais, même des politiques publiques très incitatives financièrement n’ont plus aucun effet levier auprès de ces collectivités car celles-ci n’ont plus les moyens d’apporter les 20% d’autofinancement minimum. Le mouvement de développement de « l’intercommunalité de gestion » à « l’intercommunalité de projet » que l’on connait depuis le début des années 90 est en réalité en train de s’inverser. En dehors des territoires périurbains, quelle communauté de communes rurale peut aujourd’hui mobiliser des moyens pour faire autre chose que tenter de gérer correctement ses nombreux services et équipements sans pour autant « étrangler » financièrement ses propres habitants ? La notion même «d’intercommunalité de projet » pourrait donc se voir très vite réduite à la simple capacité à assurer la gestion de services et d’équipements dans un contexte global de décentralisation non négociée et de paupérisation de l’action publique.
Parallèlement à cette évolution, la doxa néolibérale européenne qui incite depuis de nombreuses années les pouvoirs publics à ne plus financer qu’à titre marginal l’ingénierie nécessaire à la conception et à la mise en œuvre des projets de développement, vient réduire encore les faibles marges de manœuvre des collectivités (la situation étant encore pire pour les associations). A ce titre le naufrage administratif et financier du programme Leader en France, ne pouvait intervenir à une plus mauvaise période : non seulement pour les porteurs de projet privés, mais également pour les structures territoriales qui trouvaient encore par ce biais des aides financières très précieuses.
Reconstruire l’écosystème du développement local en milieu rural
Je suis convaincu que le développement territorial ne connait pas une crise des idées ou des modèles de développement, car les acteurs territoriaux et les projets sont nombreux et peuvent vite s’adapter aux défis contemporains, aux stratégies de transition etc. Ce sont les politiques publiques européennes, nationales et régionales qui brident – et c’est un euphémisme – les dynamiques locales, et ne sont pas suffisamment à la hauteur des enjeux de développement sur le terrain. En milieu rural, il existe désormais une crise structurelle profonde de l’écosystème du développement local dans certaines régions de France : les acteurs institutionnels du développement territorial (intercommunalités et communes) sont très affaiblis financièrement et très segmentés du fait de la création d’intercommunalités XXL, et les structures souples qui organisaient le dialogue territorial et la participation des acteurs ont disparu (sauf les PNR). De son côté, le monde associatif est extrêmement fragilisé sur le plan économique, et les partenariats dans le cadre de projets de développement se sont considérablement réduits. Ils ne reposent plus que sur de faibles aides en provenance du bloc communal. Bien qu’elles soient toujours force de proposition, les associations n’ont actuellement pas les moyens, seules, d’être des acteurs majeurs du développement local dans ces régions.
Ces constats qui sont bien sombres, j’en conviens. Quelles pistes de réflexions pour l’avenir ? Tout d’abord, je crois que le « big » n’a décidément rien de « beautifull ». Il est grand temps pour le législateur comme pour les réseaux nationaux du développement local de faire un « aggiornamento » en la matière. Pour ma part, je suis désormais convaincu que les enjeux de développement et de démocratie sont tels qu’il est nécessaire de rééquilibrer la relation commune/intercommunalité au profit de la première. Je pense qu’il faudrait remettre l’intérêt communautaire, ou plus exactement « l’intérêt communal » sur la table de la cuisine législative, afin de redonner des compétences et du sens à l’échelon communal et afin de redonner des marges de manœuvre financières aux intercommunalités pour qu’elles puissent devenir réellement des actrices du développement territorial. Autour des intercommunalités, il me parait indispensable également, de travailler à la reconstruction de l’écosystème du développement local dans les territoires ruraux :
– Mettre en place des politiques publiques, qui soient capables de soutenir financièrement l’ingénierie du développement, dans les associations et dans les collectivités : la doxa néolibérale qui proscrit les aides au fonctionnement au bénéfice de l’investissement est complètement périmée, tant au regard des enjeux de développement que de la réalité des besoins et du fonctionnement des territoires. Il faudrait par exemple travailler avec la Caisse des dépôts à la création d’un outil financier adapté à ce besoin.
– Privilégier désormais les logiques et les outils de la coopération aux processus de fusion : ces dernières années, la fusion a beaucoup trop souvent été le seul horizon des coopérations territoriales. Une vision simpliste mais qui a été ultra dominante. Il est grand temps de nous ré intéresser aux valeurs ajoutées des coopérations, qu’elles soient territoriales et/ou multi-acteurs. Il nous faut plus – et mieux – de politiques publiques incitatives dans ce domaine. Dans le contexte actuel, c’est bien souvent grâce aux coopérations territoriales (par exemple ville / campagne) que les collectivités acceptent encore de financer des projets de développement. La coopération permet notamment de mutualiser les coûts d’ingénierie et de mener des projets à l’échelle pertinente (filière bois, mobilité, stratégie alimentaire, tourisme…
Stéphane Loukianoff
Présentation de l’ouvrage “vous avez dit développement local ?”
Le lundi 6 mai de 16h à 19h, Georges Gontcharoff, les administrateurs et l’équipe de l’Unadel, le comité de rédaction et toutes celles et ceux qui ont contribué à la rédaction du livre “Vous avez dit développement local ?” publié par la librairie des Territoires, vous invitent à la rencontre de présentation de l’ouvrage.
Elle permettra d’échanger sur l’histoire et les fondements du Développement local, son actualité (enjeux et controverses) et son devenir. Les échanges pourront se prolonger autour d’un verre.
Organisée avec le concours de Territoires conseil, elle aura lieu dans une salle de la Caisse des dépôts et consignation, au 17 avenue Pierre Mendès France 75013 Paris.
Pour faciliter votre accueil, merci de nous confirmer votre présence en cliquant ici.