Projet de loi « engagement et proximité »

Note de Christine Brémond, administratrice de l’Unadel, septembre 2019

(Conseil des ministres du 17 juillet 2019 en débat au Sénat début octobre et en procédure accélérée)

Ce projet de loi est dans la droite ligne du débat national en réponse au mouvement de contestation de cette dernière année ou encore comment se réconcilier avec les élus locaux à quelques mois des élections municipales et remettre la commune au cœur de la démocratie.

Il répond également aux crispations de nombreux élus suite à la mise en œuvre de la loi NOTRe de 2015 votée par le gouvernement précédent et du schéma de coopération intercommunale ayant entraîné de nombreuses fusions de communautés.

Il comporte 4 titres. 3 au nom des libertés locales :

– Titre I : Conforter chaque maire dans son intercommunalité

Titre II : Renforcer les pouvoirs de police du maire

Titre III : Simplifier le quotidien du maire

Et le titre IV : Reconnaître aux élus un véritable cadre d’exercice de leur travail

Le volet intercommunal

Les fusions réalisées suite au schéma de coopération intercommunale en créant des grandes communautés contre l’avis des élus et en imposant de nouvelles compétences obligatoires comme l’eau et l’assainissement ont cristallisé un climat de contestation voire de découragement.

Aussi le projet de loi avance sur ce chantier en offrant la possibilité de revenir sur les périmètres de ces grandes communautés en donnant la possibilité de les scinder en deux voire plus à condition de respecter les seuils démographiques imposées par la loi et avec l’accord des communes membres. Cette modification de périmètre sera accompagnée d’un document sur son impact financier.

Il permet également à des communes de se retirer. Notamment le retrait dérogatoire est étendu aux communes membres des communautés d’agglomération.

Le débat parlementaire risque d’être très nourri sur ces points délicats de révision des périmètres. Par ailleurs la révision du Schéma départemental de coopération intercommunale (SDCI) prévue tous les 6 ans est supprimée.

De même la question des compétences est reprise avec le choix d’introduire de la souplesse pour  les sujets qui fâchent comme l’eau et l’assainissement pour les dates limites. En matière d’urbanisme il élargit les pouvoirs des communes sur le PLUI (plan de secteur, avis des communes sur l’évaluation du PLUI au bout de 9 ans, pouvoir pour procéder à une modification du PLUI) et concernant le tourisme les classées pourront récupérer leur office de Tourisme. De même il y aura plus de souplesse dans l’exercice des compétences en ayant la possibilité de les déléguer à d’autres collectivités ce qui permet d’avoir des solutions différenciées en fonction de la réalité des territoires.

Les relations des communes avec leur EPCI

La rédaction d’un pacte de gouvernance en début de mandat avec la possibilité de créer un conseil des maires et des conférences territoriales des maires et les conditions dans lesquelles les maires peuvent décider de certaines dépenses courantes ou disposer de certains services de l’intercommunalité.

Renforcement des droits des élus locaux

Ces mesures concernent l’extension à toutes les communes de nombreux droits : droits au congé pendant la campagne, autorisation d’absence des conseillers des communautés de communes, prise en charge des frais de garde des enfants pour les adjoints des communes de moins de 20 000 habitants, droit au remboursement des frais de mission pour les élus bénéficiant d’une indemnité, souscription d’une assurance obligatoire « protection des élus » compensée par L’État dans les communes de moins de 1 000 habitants, droit individuel de formation amélioré tout au long du mandat.

Ce résumé sera à compléter par toutes les précisions et nuances qu’apportera le débat parlementaire.

Christine Brémond, septembre 2019

Loi NOTRé : organisation territoriale toujours en chantier

Comme pour la nouvelle carte des régions, le projet de loi NOTRé, voté le 10 mars en première lecture à l’Assemblée Nationale, est le fruit d’arbitrages qui le rendent peu lisible pour les citoyens. Le point de vue de Claude Grivel, président de l’Unadel.

CC BY-SA 3.0

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L’adoption du projet de loi NOTRé par les députés confirme certains grands écarts qui peuvent laisser les citoyens perplexes  : renforcement des régions et maintien des départements – jusqu’à quand ?, répartition des compétences encore instable,  création d’une nouvelle instance de concertation… À l’approche des élections départementales, la vision du gouvernement sur l’organisation territoriale ne saute pas aux yeux. Comment ce projet pourrait-il in fine apporter plus de cohérence, d’efficacité et qui sait, de justice sociale et de démocratie  ?

Suffrage universel. Les députés ont confirmé le principe de l’élection au suffrage universel direct des conseillers communautaires de tous les EPCI à fiscalité propre lors des prochaines élections municipales et communautaires, en 2020. « On peut espérer que cela poussera les candidats à se présenter avec un projet communautaire ; mais cela peut aussi politiser le scrutin, là où des consensus se sont construits dans la durée et sur la base d’un projet communautaire dépassant les clivages partisans » remarque Claude Grivel,  président de l’Unadel.

Clause de compétence générale. La suppression de la clause de compétence générale s’accompagne d’un panier de compétences élargi pour les départements. Quant aux régions, elles seront chef de file sur le développement économique, les transports –  y compris les transports urbains et scolaires  –, la gestion des ports et le tourisme, même si ce dernier domaine demeure une compétence partagée. «  On peut penser qu’il y aura plus de clarté dans cette répartition de compétences avec la suppression de la clause de compétence générale. Toutefois, on trouve peu de compétences spécifiques après cette 1ère lecture. Si cela pousse à préciser le rôle des uns et des autres dans le cadre des conférences territoriales de l’action publique et des chefs de filat, pourquoi pas  ? Cela aurait le mérite de faire confiance aux élus qui devront s’organiser avec moins d’argent public à gérer, plus de choses à assumer et tout cela sans se marcher sur les pieds ni faire de doublons. Bel exercice de démocratie et de responsabilité. Mais ça c’est un schéma idéal qui peut ne pas fonctionner dans de grands espaces régionaux avec des majorités qui auront des intérêts différents quelle que soit leur couleur politique », explique Claude Grivel. Pour la lisibilité pour le citoyen, il reste du chemin à parcourir.

Pouvoir réglementaire. L’Assemblée nationale a aussi voté un amendement  de l’Association des régions de France (ARF) visant à renforcer dans la loi le pouvoir réglementaire de la région dans certains cas.

«  C’est la victoire de ceux qui préfèrent contraindre plutôt que convaincre  ! Ça va plus vite mais est-ce efficace et durable ? L’exercice d’un pouvoir réglementaire poussera inévitablement les régions dans un rôle de prescripteur et de contrôleur. Est-ce cela qui leur donnera davantage de poids stratégique  ? Cela reste incertain. Pour autant le Schéma Régional d’Aménagement et de Développement Durable du Territoire (SRADDT) obligatoire, dont l’étude d’impact donne les premières orientations, peut faire évoluer les choses. Dans une région constituée à partir de trois régions n’ayant pas de SRADDT élaboré, le chantier risque de prendre du temps, comme c’est la cas pour l’Alsace-Lorraine-Champagne-Ardennes (ALCA). »

Haut conseil des territoires. La création d’un nouveau lieu de concertation entre le gouvernement et les représentants des collectivités territoriales sur toutes les questions relatives à la gestion locale s’opère alors que le gouvernement vient de créer une nouvelle instance de concertation avec les collectivités  : le Dialogue national des territoires. « Cela peut être la pire comme la meilleure des choses. Cela peut-il diminuer le rôle du Sénat et/ou des associations d’élus dans leur rôle de représentation des territoires, au profit d’une représentation des territoires de projets  ? Rien n’est moins sûr ! », poursuit Claude Grivel.

Ouverture du nouveau chapitre Engagement citoyen et participation, issu du travail associatif. « Nous y avons travaillé et nous l’avons obtenu. Il reste cependant beaucoup à faire pour l’étoffer avant la 2ème lecture et convaincre le rapporteur et le groupe majoritaire pour pouvoir aller plus loin dans les contenus de ce chapitre.  »