Rapport de l’AITEC : “Collectivités locales, reprendre la main, c’est possible !”
“Le nouveau rapport de l’AITEC « Collectivités locales, reprendre la main, c’est possible ! Politiques publiques de transition démocratique et écologique : résistances et alternatives locales à la libéralisation » se fonde sur une enquête approfondie menée en 2017 auprès d’élu-e-s, d’agents territoriaux, et d’acteur-trice-s du monde associatif. Il met en avant des politiques publiques locales alternatives, plus démocratiques, plus justes et plus durables, à rebours de la libéralisation des marchés, du tout-privé et d’une économie hors-sol.
L’aspiration modeste est de dresser un paysage non exhaustif des contraintes réglementaires que rencontrent les collectivités locales progressistes pour porter des politiques publiques locales de transition démocratique et écologique. Ce rapport propose des pistes pour saisir les opportunités permettant de créer un “écosystème” d’alternatives afin de renouveler ou inventer des formes de gouvernance locale plus démocratiques, justes et durables.“
Contact : contact.aitec@reseau-ipam.org
Points que soulève le rapport de l’AITEC et liens avec les actions menées par l’Unadel (par Sabine Hutareck, membre du bureau de l’Unadel) :
Cette étude renvoie à la nécessité d’un développement endogène dans les territoires par rapport au modèle dominant qui est exogène et qui dépossède les acteurs locaux, dont les collectivités territoriales, de leur pouvoir au profit du privé et de grands groupes.
Cette nécessité d’un développement endogène des territoires pour redonner du pouvoir au local et contrebalancer les effets pervers de la mondialisation et de la délocalisation de l’emploi, renvoie aux dynamiques de développement local. Par ses valeurs, ses actions, ses publications et sa mission d’accompagnement au développement des territoires, l’Unadel s’inscrit dans un certain nombre de préconisations du rapport : sur les transitions énergétiques et la mise en réseau des territoires (voir par exemple le rapport de synthèse « Transition et conduite du changement »), sur la mobilisation d’acteurs et l’implication citoyenne (voir par exemple les écoutes territoriales et citoyennes, le Carrefour des métiers, les Journées des territoires)…
Comprendre son passé pour préparer son avenir : retour sur la rencontre-débat du 6 mai 2019
Le lundi 6 mai, Georges Gontcharoff, les administrateurs et l’équipe de l’Unadel, tous celles et ceux qui ont contribué à la rédaction du livre “Vous avez dit développement local ?” publié par la librairie des Territoires, ont organisé une rencontre de présentation de l’ouvrage [disponible en cliquant ICI].
Celle-ci a permis d’échanger sur l’histoire et les fondements du développement local, son actualité (enjeux et controverses) et son devenir. Les échanges se sont prolongé autour d’un verre. Organisée avec le concours de Territoires conseil, la rencontre a rassemblé 40 participants dans une salle mise à disposition par la Caisse des dépôts et consignation à Paris.
Extraits du propos d’ouverture, par Claude Grivel, président de l’Unadel :
[…] Parler développement local aujourd’hui, est-ce faire preuve de résistance et de crispation passéiste ? ou n’est-ce pas davantage s’inscrire délibérément dans une approche avant-gardiste de la transformation sociale et sociétale, capable de faire germer les graines de la résilience des territoires et des hommes ?
Pour l’Unadel le développement local est un incubateur de projet, un accélérateur de changement, un levier pour développer la culture de la démocratie d’implication et du débat, comme de la co-construction de politiques publiques adaptées aux besoins et non imposées par les objectifs comptables et la réduction de pseudo déficits.
Le développement local est une méthode, une démarche et un engagement : celui de mettre l’humain au centre, de développer la qualité du vivre ensemble sans oublier l’importance du faire ensemble et de prendre toute sa part des responsabilités ; celle de construire du commun et de la coopération plutôt que de la concurrence et de la compétition.
Le développement local, c’est une histoire et un savoir à partager pour construire demain. […]
Ce livre est un recueil de clefs pour comprendre et se projeter dans un monde en profonde mutation. C’est un socle de transmission de savoirs. Écrit à plusieurs mains autour du métier à tisser de Georges Gontcharoff, dont la plume est toujours aussi précise et alerte, il est mis à disposition des étudiants, des chercheurs et tous les observateurs avisés de la résilience des hommes et des territoires ; il s’adresse également aux militants et à tous ceux qui, dans leurs responsabilités respectives, œuvrent pour une société plus juste, plus humaine et plus désirable. […]
Lire le propos d’ouverture de Claude Grivel en entier
Extraits du texte de Patricia Andriot sur la rencontre du 6 mai :
[…] A travers le rappel historique du développement local tel que présenté dans le livre, et quelques témoignages de contributeurs, la discussion porte sur le chemin parcouru, le sentiment d’une institutionnalisation des politiques territoriales qui n’a pas laissé une vraie place au local et à la créativité citoyenne. Les débats laissent rapidement transparaître un sentiment d’échec quand à la reconnaissance du rôle des mouvements de développement local face aux enjeux actuels. […]
Mais il ne faut pas sous-estimer l’apport des mouvements de développement local à la reconnaissance des territoires, à la culture de l’éducation populaire ou à celle du débat… et à leur reconnaissance par les politiques publiques, qui permettent quand même de maintenir un champs des possibles ouvert pour résister à l’uniformisation et au rouleau compresseur du néo-libéralisme. […]
Selon l’adage qui veut qu’il faut comprendre son passé pour préparer son avenir, cet ouvrage tombe à point nommé en ces temps de grandes transitions, de pertes de repères généralisés et ou le territoire fait figure d’ancrage ou de boussole. A saluer la lucidité d’un mouvement qui ose regarder sans complaisance son bilan, ose dire son incompréhension ou son questionnement pour contribuer aux débats actuels. Cet ouvrage est une riche contribution au débat, qui fait attendre avec impatience le second volume qui devrait analyser la complexité et profiter des enseignements du passé pour participer à l’avenir.
Retour sur les Rencontres de l’interrogation Démocratique de Kingersheim (2ème édition- mai 2019)
Le maire de Kingersheim, Joseph SPIEGEL est un compagnon de route de l’Unadel. C’est aussi un passionné du fonctionnement démocratique et des expériences qui font sens. Il parle souvent de son expérience locale de la démocratie d’implication. Pour la 2ème année consécutive, il accueille dans sa commune les Rencontres de l’interrogation Démocratique. Jean Maillet, Axel Othelet et Claude Grivel y étaient en 2018. Axel y est retourné cette année avec Citoyens et Territoires-Grand Est. Cora Klein, qui a connu l’Unadel par Odile-Alsace, a accepté de nous faire un petit retour après son passage à Kingersheim et nous propose de nous transformer en crapauds fous.
Un texte de Cora KLEIN
Ambiance chaleureuse et sentiment de communauté lors de la 2ème édition des Rencontres de l’Interrogation Démocratique organisées par la ville de Kingersheim en mai dernier.
On pourrait se dire pourquoi, encore et toujours, échanger sur la démocratie, la co-construction…
Quoi de neuf au final dans ces rencontres ? Paroles de participants : « nous étions enthousiastes à se redire ensemble que les expériences présentées nous font du bien parce qu’elles permettent de montrer que l’humanité, quand on ouvre ses portes, est en capacité de coconstruire, de collaborer ». Un vieux monsieur est revenu aux Rencontres, malgré une prise de parole qui laisse paraître une démotivation: « je voudrais m’excuser, dit-il, j’étais beaucoup engagé dans ma vie. Mais aujourd’hui je suis fatigué et j’ai du mal à y croire encore ».
Est-on dans un optimisme béat ? Non, bien entendu, s’appuyer sur le positif n’empêche en aucun cas de s’intéresser aux questions de fond et notamment la suivante :
Par quoi commencer ? Comment sensibiliser aux démarches collaboratives et de co-construction toute une frange de population non intéressée à priori et pourtant concernée par les défis de la planète ?
Des réponses partagées :
-
Partir des besoins réels des gens, une clé pour réussir à engager les habitants et l’expérience de Solucracy : http://www.solucracy.com/
-
Pour créer du bien commun : L’importance du trans… : transgénérationnel, transfrontières, transculture,… Ne pas hésiter dit Thanh Nghiem à créer des groupes improbables qui travaillent ensemble
« Ne doutez jamais qu’un petit groupe de gens réfléchis et engagés puisse changer le monde. En fait, cela se passe toujours ainsi », cette citation de Margaret Mead fait écho aux propos de Thanh Nghiem, co-fondatrice du mouvement des Crapauds fous, qui préconise la transformation sociale et écologique en partant des idées novatrices portées par des personnes à contre-courant. Elle était l’invitée phare lors des RID ce 10 mai à Kingersheim.
Ce nom des « crapauds fous » est une analogie qui s’appuie sur l’observation de ces batraciens dans leur environnement : lors de la saison des amours, ils vont dans l’eau pour se reproduire et traversent les routes. Certains de ces crapauds font bande à part : des originaux, des fous…, qui inventent de nouvelles voies, et qui sont souvent ceux qui, parce qu’ils ne meurent pas écrasés sur les routes, assurent la survie de l’espèce. Le « Crapaud fou » traduit l’idée que la survie d’une espèce donnée passe par un changement des comportements.
S’appuyant sur cette analogie dans la nature, l’association des « crapauds fous » invite au pas de côté, à penser autrement et à réhabiliter les utopies face aux 3 tsunamis planétaires qu’elle identifie et qui peuvent toucher (mobiliser) beaucoup de monde :
-
Le péril écologique
-
Le péril démocratique face aux phénomènes de viralité des Fake news et des silos communautaires apparus avec les réseaux sociaux et qui menacent la démocratie. « Une fake new est 6 fois plus virale qu’une information orale : comment lutter contre ce fléau ? »
-
L’Intelligence artificielle susceptible d’échapper à tout contrôle. Les écrans sont partout comment se les réapproprier ?
Il est nécessaire de provoquer un déclic, une prise de conscience et donner des clés pour que chacun puisse devenir acteur de ce nouveau monde qui arrive. Aujourd’hui sur les territoires en France, des « cohortes » de gens s’emparent des problèmes locaux et cherchent des solutions différentes. « Il faut des groupes de fous qui disent que c’est possible ! » s’exclame Thanh Nghiem. https://crapaud-fou.org/
L’association des crapauds fous partage tout ce qui se fait selon cette idée : « Je sais quelque chose qui marche pour moi, pourquoi ne pas le partager avec les autres » : Copier pour faire boule de neige et rendre viral les choses positives ?
Un temps apprenant où les participants ont pu se questionner sur les ressources et les obstacles pour construire une démocratie de participation en partant de leur expérience sous la forme d’histoires apprenantes. Ils n’ont pas hésité à proposer des thèmes ou des projets à explorer ensemble en sous-groupes avec des méthodes du co-développement pour faciliter ce cheminement du « je » au « nous » sur les territoires. Voici quelques exemples de projets ou thèmes :
-
Préparer les élections de 2020 avec l’approche de participant
-
Comment faire reconnaître la vérité aux climato-septiques ?
-
Comment développer le pouvoir d’agir des personnes fragiles ?
-
Comment créer du lien à Kingersheim dans les endroits où cela manque ?
-
Comment un territoire peut-il se mobiliser avec les citoyens sur un projet climatique ?
-
Etc…
Il reste du chemin à parcourir : utopiste et un peu fou, pourquoi pas vous ?
NDLR : si comme Cora KLEIN, vous participez à un évènement, une rencontre, une action en région qui peut intéresser le réseau et les acteurs du développement local, n’hésitez pas à nous proposer vos notes…pour que nous puissions les diffuser dans notre newsletter. Vos analyses, vos contributions peuvent aussi intéresser le réseau.
Je suis Charlie – Nous sommes Charlie – l’Unadel est aussi Charlie
Par son ampleur, par sa tenue, la manifestation de ce dimanche 11 janvier 2015 a impressionné la France. Elle a aussi rassemblé et laissé son empreinte dans bon nombre de démocraties à travers le monde.
Par sa mobilisation, par son unité, ce peuple français volontiers frondeur, gouailleur, a rappelé les fondamentaux issus des Lumières, inscrits au frontispice de ses monuments publics : liberté, égalité et fraternité.
Cette dernière est le plus souvent ignorée, occultée.
Ce rappel digne et fort interpelle l’Unadel. Il conforte et réactualise notre projet associatif, décentralisateur, territorial et citoyen.
L’Unadel s’est rassemblée sur la conviction qu’un développement plus solidaire, plus fraternel restait à construire et à amplifier.
Elle s’est rassemblée sur la confiance dans la capacité des hommes et des femmes de ce pays à y contribuer dans le vivre et le faire ensemble, dans les territoires ruraux et dans les quartiers urbains, en France comme à l’international.
L’Unadel s’est rassemblée sur la conviction que les acteurs locaux, élus comme société civile, pouvaient, voulaient être plus responsables pour bâtir des communautés de projets sur un espace de vie avec des pratiques respectueuses de valeurs partagées et de l’environnement.
Ce dimanche 11 janvier 2015, la France a rappelé un certain nombre de fondamentaux aux fondamentalistes, certes, mais aussi aux élus de la Nation.
– La France est laïque, c’est-à-dire qu’elle doit respecter toutes les opinions qui s’inscrivent dans l’acceptation des valeurs de la République, affirmées dans la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, préambule de toutes nos constitutions.
– La démocratie est certainement le modèle d’organisation de la société le plus abouti, malgré sa fragilité, pour peu qu’il repose sur un triptyque : le principe de la représentation, celui de la délégation et celui de la participation citoyenne. Les manifestants ont donné dimanche pour tâche aux élus, de tous bords, de faire confiance à cette société rassemblée.
Cela ne peut, ne doit pas se jouer seulement à l’occasion d’événements aussi dramatiques que l’assassinat de Charlie Hebdo, de représentants des forces de l’ordre et de citoyens français, faisant leurs courses dans un supermarché.
La Laïcité et surtout la démocratie sont un bien trop précieux, qui doit être (re)cultivé. Comme nous l’affirmions en 1997, lors de l’Appel aux femmes et aux hommes, dans notre Manifeste de Carcassonne :
« Nous affirmons que la créativité et la reconnaissance de l’autre permettent à des hommes et à des territoires de se développer en dépit des évolutions dominantes.
Loin des esprits fatalistes qui font de l’économisme et de la mondialisation de nouveaux déterminismes. Loin de la politique subie comme un jeu cynique aux enjeux de pouvoir dérisoires. Loin de tout triomphalisme dans une société sans repère. Loin des replis sur soi égoïstes, corporatistes ou communautaires.
Oui, loin de ces archaïsmes-là et contre les dangers qu’ils génèrent, nous situons notre action au cœur de ce monde et de la modernité. »
Oui, depuis le 7 janvier 2015, depuis Charlie, nous sommes encore plus convaincus qu’il faut faire le pari de la construction d’espaces de compréhension, de participation, de débat et de démocratie pour interpeller les blocages, voire la fragmentation de notre société. Notre débat démocratique se technicise, se professionnalise et la démocratie s’étiole, s’effrite. Camus le rappelait :
« La démocratie, ce n’est pas la loi de la majorité, mais la protection de la minorité. »
À laisser les quartiers devenir des espaces de relégation, à faire des territoires les plus ruraux des réserves périphériques qui échappent à la mondialisation triomphante, on ne doit pas s’étonner qu’une République à plusieurs vitesses laisse des hommes se perdre et basculer dans des projets fous, dangereux et suicidaires pour eux-mêmes et pour la fraternité.
Il est temps de regrouper les forces innovantes à travers tout le pays , tous les pays. Il est temps de mettre en scène notre conviction. Il est temps de construire ensemble un discours commun enraciné dans nos pratiques… Nous devons écrire ensemble un nouveau récit républicain porteur de transformation sociale, de lucidité et d’espérance, demain, pour construire des Territoires d’Avenir, creusets de la démocratie et du rassemblement autour de valeurs simples, humanistes, profondément laïques et républicaines.
Nous avons collectivement le devoir d’agir, de réagir et… avec Charlie, de pardonner.