C’était la question posée à l’un des ateliers des Etats généraux des Pays le 1er juillet dernier.
Pour les participants, la plus-value des pays réside dans leur capacité à révéler et à organiser des compétences, par la mobilisation, l’animation, le travail en commun multi-acteurs.
C’est ainsi que les pays sont et resteront des territoires de projet.
Mais cela nécessite des méthodologies spécifiques et des moyens en ingénierie : les participants à l’atelier appellent l’Etat à contribuer au financement de cette ingénierie.

Après “Vivre et travailler au pays”, “Réfléchir au pays” !

 

 

Une enquête réalisée en 2004 par ETD sur l’ingénierie des pays proprement dite[1] révèle que, sur l’ensemble des pays, on observe une moyenne de 3,4 techniciens par pays (cette moyenne augment sensiblement – 4,2 – si l’on considère seulement les pays reconnus). Sans surprise, la spécialisation augmente avec la taille des équipes : au-delà de 3 postes ayant des fonctions transversales (direction, gestion administrative et financière, animation du conseil de développement, programme Leader+), les postes sont thématiques (économie et tourisme en premier lieu). Les équipes font appel à des services ponctuels d’information (conseil régional, conseil général, État), à des consultants extérieurs (une intervention de consultant par territoire en moyenne pour 2003).

 

Cependant l’ingénierie du pays ne se limite pas aux seuls salariés de la structure porteuse ! Entre les élus, les membres du conseil de développement (on estime leur investissement en temps à 2 postes à temps plein par pays), les autres techniciens présents sur le territoire (communautés de communes, organismes de développement, associations…), ce n’est pas la matière grise qui manque sur les territoires ! Sans oublier les appuis extérieurs qui, centres de ressource, conseils régionaux et généraux, consulaires, bureaux d’étude ou services de l’État, contribuent eux-aussi à l’ingénierie locale…

 

L’enjeu est donc dans la coordination de ces différents types de ressources humaines qui sont la grande force des pays : c’est par la diversité et la conjonction des acteurs impliqués dans le projet du territoire que celui-ci s’enrichit et dépasse le catalogue d’actions. C’est par la constitution d’une culture commune que le territoire se forge une identité, et même une certaine fierté, comme dans le Pays des Landes de Gascogne où les efforts des techniciens pour mieux partager le projet ont abouti à ce qu’élus, société civile, et eux-mêmes ! identifient les compétences présentes sur le territoire et prennent conscience de son potentiel humain. Ou dans le Pays du Sud-Charente, qui a expérimenté pendant les deux années d’élaboration de sa charte toute la richesse d’un travail en commissions mixtes élus-bénévoles.

 

Le Pays de Fougères s’est d’emblée positionné sur de la coordination, estimant que les compétences se trouvaient au niveau des communautés de communes. En s’appuyant aussi sur d’autres structures (pays d’accueil touristique, CCI, mission locale, centre social…) pour le fonctionnement de son conseil de développement, l’équipe du Pays s’est assurée les conditions du maillage du territoire, de l’appropriation du projet du pays, et d’une circulation ascendante et descendante efficace. Si ce système est fragile, puisqu’il n’est formalisé par aucune convention, sa souplesse permet en contrepartie que les responsabilités tournent facilement.

 

Un autre exemple de structuration des compétences entre techniciens est la formation-action organisée par la Fédération nationale des Parcs naturels régionaux, où 73 techniciens de 41 structures (communautés de communes, pays, parcs…) ont mis à profit une démarche inter-territoriale entre les 4 Parcs régionaux auxquels ils appartiennent, pour mieux travailler ensemble au sein de leur propre territoire. Ils souhaitent maintenant élargir ce processus aux élus…

 

La formation-action est décidément un moyen efficace pour se constituer une culture commune et qualifier le territoire.

L’ADEFPAT, association intervenant en Midi-Pyrénées, la pratique depuis 20 ans dans l’objectif de développer le territoire en développant les compétences présentes sur ce territoire (groupes locaux d’appui à des projets, formations multi-acteurs). Elle a ainsi par exemple favorisé la création, dans le cadre de formations, d’un groupe intersectoriel blé-farine-pain, regroupant des agriculteurs, des meuniers et des boulangers, ou encore d’un groupe crèche, regroupant des parents, des élus, des techniciens. Cependant les frontières subsistent entre les mondes de la formation et du développement local, et l’ADEFPAT éprouve des difficultés à transférer son expérience à d’autres régions de France.

Dans un autre registre, l’association Élixir travaille à l’émergence des compétences présentes sur les territoires au travers d’un appui aux démarches participatives en Provence-Alpes-Côte d’Azur. L’objectif est de faire en sorte que les personnes qui n’ont pas l’habitude de participer aux démarches de développement local puissent le faire. Pour cela, il est important de travailler selon une approche sexuée (approche genre). Là encore, la formation-action est utilisée.

 

François Poulle, administrateur de l’Unadel en charge de la plate-forme “Métiers du développement territorial”, a de son côté expliqué comment la réflexion de cette plate-forme s’était élargie depuis sa constitution en 2001 à une approche par les compétences, qui ne sont pas liées aux statuts. Le référentiel de compétences “cœur des métiers” que la plate-forme vient de terminer[2] devrait ainsi être un outil pour mieux structurer la mutualisation des ressources humaines, d’autant plus qu’il met en évidence la diversité des métiers du développement.

En parallèle, une exploration a commencé sur la déontologie des territoires, comprise comme les règles que se donnent les acteurs pour travailler ensemble. Les points déjà observés sont la question du bénévolat et la question de la créativité.

 

Mais de fortes inquiétudes pèsent sur le financement de cette “mise en mouvement” des pays : impliquer toutes sortes de partenaires, y compris bénévoles (1 000 personnes impliquées dans le conseil de développement du Pays du Libournais, par exemple), identifier et coordonner les compétences locales, est un travail essentiel si l’on considère que le pays doit bien rester un espace de projet.

Or c’est un travail de longue haleine qui nécessite un investissement financier durable.

Si les participants à l’atelier ont indiqué que mutualiser les compétences techniques à l’échelle du pays est une démarche d’avenir, ils ont aussi précisé qu’elle ne résout pas tout, et que d’importants besoins de financement de l’ingénierie subsistent.

Certains conseils régionaux et généraux (Deux-Sèvres, Eure…) contribuent à ce financement, affirmant ainsi que le rôle des techniciens est d’apporter de la valeur ajoutée, de travailler sur la dimension projet du pays, et non de chercher à longueur d’année les moyens de payer leur poste, ce qui risquerait de transformer les pays en structures de gestion de projet.

Cela n’en exonère pas l’État, dont la capacité de péréquation reste très fortement attendue par les acteurs des pays !

 

 

 

 

 

 

 

 

 



[1] Les moyens d’ingénierie des pays. Pour quels projets ? téléchargeable sur le site d’ETD à l’adresse suivante :www.projetdeterritoire.com/spip/Documents/notes_obs/note_ingenierie.pdf

[2] Référentiel de compétences “cœur des métiers”, téléchargeable sur le site de l’Unadel à l’adresse suivante :unadel.org/dossiers/dossiers.php?id_dossier=348

Auteur : Nathalie Lacroix

Partager…

… et s’inscrire pour recevoir nos informations :

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription.
Votre inscription est confirmée.

Dans la boîte !

Inscrivez-vous à notre newsletter pour suivre nos actualités.