En ce début d’été 2009, la France attend ce qu’on lui a annoncé en matière de réforme des institutions et du financement local ; on lui a assuré que le gouvernement irait « jusqu’au bout ». Nous apprendrons donc à la rentrée ce que des experts en gouvernance, en démocratie et en services publics auront concocté pour l’avenir de la France : réduction du mille feuille et du nombre d’élus locaux, rationalisation des dépenses locales, émergence de métropoles à taille européenne, réforme de la taxe professionnelle et du même coup refonte du système de financement des collectivités locales ?

C’est dans ce contexte que l’Unadel a choisi d’inviter le 24 juin un large éventail d’acteurs (agents de développement, élus, membres d’instances de concertation, collectivités territoriales, universitaires…) à réfléchir avec Martin Vanier, Georges Gontcharoff, Philippe Langevin et Françoise Carayon[1] aux enjeux véritables auxquels une réforme dans le domaine des collectivités locales pourrait répondre aujourd’hui.

Martin Vanier propose cinq enjeux : gouverner un « espace mobile », organiser le « partage des pouvoirs » entre les territoires, « régénérer la démocratie locale » par l’exercice d’une citoyenneté active, inventer de « nouveaux champs fiscaux » (mobilité, immatériel) en substitution aux impôts patrimoniaux, « ménager l’espace dans la durée » plutôt qu’organiser une compétition des territoires aux effets dévastateurs. En même temps il souhaite qu’on distingue sans les confondre, les gouvernements locaux (rapport Balladur) qu’il compare au matériel informatique et la gouvernance territoriale qu’il assimile aux logiciels qui y sont installés. C’est évidemment dans la gouvernance territoriale où il voit de nouveaux chantiers à ouvrir : inventer des « règles de décision partagée » entre territoires (nouveaux agencements territoriaux, repenser « une division des fonctions politiques » en substituant aux approches techniques actuelles condamnées à une improbable transversalité une « autre manière de délibérer, de concevoir, de gérer, d’évaluer » notamment dans les nouveaux champs de l’énergie/mobilité, de la nourriture et des espaces ouverts…). C’est ainsi d’après lui, qu’on pourrait aller « jusqu’au bout ».

Georges Gontcharoff qui a effectué récemment un travail minutieux d’auscultation de vingt-six territoires intercommunaux, déclare être gêné par le transfert inadéquat du terme « gouvernance » emprunté à l’entreprise aux collectivités locales. Il rappelle l’utopie (1960-70) des Pays avec des élus et une société civile. Il souligne la méthode actuelle (lancement de ballons d’essais… plus ou moins abandonnés ou repris) d’élaboration antidémocratique des politiques publiques qui impactent l’organisation des territoires (achèvement de l’intercommunalité ; fusion de communautés trop petites…). Il rappelle que l’intercommunalité s’est en quelque sorte calquée sur le canton dans plus de 75% des cas et que les communautés de communes bi-cantonales (12% des cas) se sont constituées sur des bases d’affinités politiques. Il souligne l’importance de la ville et l’abandon de l’espace rural. Il pressent que le couple idéalisé du « Pays et de la région » est menacé par la réforme et que dans le couple « région département » rien ne sera réglé facilement. Enfin il souligne le danger de supprimer la clause de compétence générale pour les collectivités et de les spécialiser sur des compétences exclusives, et regrette l’incapacité à imaginer autre chose qu’une subsidiarité descendante à l’initiative de l’Etat qui en profite pour transférer des compétences et les charges associées aux collectivités tout en réduisant leurs marges d’autonomie financière. Il rappelle également la revendication ancienne de faire élire des délégués communaux à l’intercommunalité au suffrage universel direct.

Un débat intéressant a confronté la grandeur et "la misère" du conseil de développement avec l’expérience d’une société civile qui se veut indépendante des élus, mais reconnue par eux, pourvoyeuse d’avis mais pas contrepouvoir, respectueuse du pouvoir de décision des élus.

Les débats qui ont suivi les communications, nourri par les expériences de terrain portées par les participants ont abordé notamment les questions suivantes :

-la transgression de territoires (notamment transfrontalier),

-la plus-value apportée par la démocratie participative aux politiques publiques,

-la nécessaire formation des élus et des citoyens et l’existence de lieux de réflexion,

-les nouvelles formes d’exercice de la citoyenneté s’affranchissant des territoires ou diffuses et souvent non prises en compte, parce que situées à côté des dispositifs institués de démocrate participative.

Les actes de ce séminaire seront bientôt disponibles sur le site de l’Unadel. Enfin, quatre publications récentes ont été présentées aux participants :

« Le pouvoir de territoires » de Martin Vanier aux éditions Anthropos

« Conseil de développement Mode d’emploi » coproduits par l’Unadel et l’Adels

« Dix territoires d’hier et d’aujourd’hui » pour mieux comprendre le développement local de Georges Gontcharoff édité par l’Adels.

« Passé présent et futur de l’intercommunalité et du développement local en deux tomes par Georges Gontcharoff édité par l’Adels.

Cf. www. adels.org et www. unadel.asso.fr.



[1] Respectivement, professeur de géographie à Grenoble, militant de la démocratie locale, professeur d’économie à l’université méditerranéenne, présidente du Conseil de développement de la communauté d’agglomération « plaine commune » et de la coordination nationale des Conseils de développement.

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