►Regard sur le Titre III chapitre 12 de l’avant projet de loi sur la décentralisation : le PLU Intercommunal
Depuis le 13 décembre 2000 et la loi « Solidarité et Renouvellement Urbain », le Plan Local d’Urbanisme (PLU) remplace l’ancien Plan d’Occupation des Sols (POS). La loi du 12 juillet 2 010, dite « Grenelle II » a modifié plusieurs aspects du PLU. Les PLU ne sont pas réservés aux seules communes urbaines. Les petites communes se dotent d’une « carte communale », sorte de PLU simplifié. Cependant, une commune de petite taille, mais soumise à une forte pression foncière (une commune littorale, par exemple) ou à de forts enjeux paysagers, architecturaux ou patrimoniaux (commune d’un Parc Naturel Régional, par exemple) peut avoir intérêt à se doter d’un PLU.
Le périmètre du PLU
Le PLU peut être élaboré au niveau d’une commune ou au niveau d’une structure intercommunale. Il peut alors couvrir une zone relativement importante. Par exemple, le PLU de la Communauté Urbaine de Lille s’applique à 85 communes.
L’intégralité du territoire de la ou des communes concernées doit être couverte par le PLU. Autrefois, par des dispositions qui ont été abrogées, exception était faite pour les Zones d’Aménagement Concerté (ZAC) qui avaient leur propre document d’urbanisme, dérogatoire au POS : le Plan d’Aménagement de Zone (PAZ). Seuls sont exclus du champ des PLU, les secteurs sauvegardés (loi Malraux) dont l’aménagement relève de la compétence de l’État et qui sont couverts par un Plan de Sauvegarde et de Mise en Valeur (PSMV) distinct du PLU mais annexé à lui.
Les PLU intercommunaux
Ils ont été fortement poussés par le ministère de l’écologie qui, en 2011, a débloqué des crédits de 50 000 euros pour chacun des 31 territoires voulant expérimenter ces PLU intercommunaux. Il s’agit, dans l’esprit Grenelle I et Grenelle II d’intégrer aux PLU des préoccupations plus écologiques : trame verte et bleue, « intégration de critères de soutenabilité dans les orientations d’aménagement et de programmation », et de mieux assurer la coordination avec le Programme Local de l’Habitat (PLH) et le Plan de Déplacements Urbains (PDU) qui sont souvent, en effet, élaborés à une échelle plus vaste que celle de la commune. Quand un EPCI dispose de la compétence aménagement et urbanisme, il est logique que le périmètre du PLU soit celui de l’EPCI. Cette politique d’intercommunalisation des PLU rencontre la résistance d’un certain nombre de maires « qui veulent rester maîtres chez eux » et décider seuls de l’usage de leurs sols.
Le rapport de présentation du PLU
Ce rapport comporte cinq éléments :
– un diagnostic territorial (la situation de la commune et ses principaux enjeux) ;
– une description de l’état initial de l’environnement (les milieux naturels, la qualité de l’eau, de l’air, du sol, la composante faune/flore, les équilibres et les continuités écologiques ) ;
– les orientations générales retenues par le PADD (voir ci-après) et le zonage (zones pouvant accueillir l’habitat et les principales règles d’urbanisation, zones naturelles ou agricoles à protéger et principales règles s’y appliquant)
– les incidences prévisibles sur l’environnement (indiquer de façon précise les conséquences des choix de la commune sur l’environnement – nombre d’hectares rendus constructibles, la construction possible dans les espaces naturels et agricoles, la protection de l’air, de l’eau, du sol…) ;
– la compatibilité au regard des lois et règlements (préciser en quoi les choix spatiaux et réglementaires de la commune (ou de l’intercommunalité) respectent les principales lois notamment en matière de protection des paysages et de l’environnement : loi littoral, loi montagne, Natura 2000 …
Le Plan d’Aménagement et de Développement Durable (PADD)
Le PADD constitue l’élément essentiel de l’évolution de la législation. « C’est un document prospectif exprimant des choix politiques, sur les objectifs et les projets de la collectivité locale en matière de développement économique et social, d’environnement et d’urbanisme, à l’horizon de 10 à 20 ans ». Il répond au principe du développement durable et inscrit le PLU dans une perspective plus lointaine. Initialement opposable aux tiers il a perdu cette qualité par une loi de juillet 2002. C’est ainsi que le juge administratif « se garde le droit d’interpréter, « de façon souple », le règlement en recherchant la volonté communale exprimée par le PADD ». L’évolution du PLU et sa révision, si elle porte sur « l’économie générale » peut entraîner la nécessité de procéder à une modification du PADD, afin de conserver une cohérence.
La loi Grenelle II ajoute que « si le périmètre d’un Schéma de Cohérence Territoriale (SCOT) recouvre tout ou partie celui d’un Pays ayant fait l’objet d’une publication par arrêté préfectoral, le PADD du SCOT prend en compte la charte de développement du Pays ».
Cette même loi Grenelle II modifie les objectifs du PADD, en précisant qu’il « fixe les objectifs des politiques d’urbanisme, du logement, des transports et des déplacements, d’implantation commerciale, d’équipements structurants, de développement touristique et culturel, de développement des communications électroniques, de protection et de mise en valeur des espaces naturels, agricoles et forestiers, de préservation des ressources naturelles, de lutte contre l’étalement urbain, de préservation et de remise en bon état des continuités écologiques ».
Paradoxalement, la loi Grenelle II, sous la poussée libérale, a assoupli la législation concernant les constructions dans les zones protégées. Elle a rétabli la possibilité de dépasser de 20 % les limites de gabarit et de densité d’occupation du sol dans ces zones, « si les constructions remplissent certains critères de performance énergétique ou comportent des équipements de production d’énergie renouvelable ».
Les élus ont beaucoup protesté contre les incessants changements de législation qui les obligent à réviser les PLU et les SCOT. Ils ont, semble-t-il jusqu’au 1er janvier 2016 pour intégrer les dispositions du Grenelle II.
La loi « Urbanisme et Habitat » du 2 juillet 2003, est, elle aussi, prise dans la logique libérale d’assouplissement de la législation. Elle permet aux collectivités « d’orienter leur vision du développement » « au-delà du strict formalisme du document réglementaire » à travers ce que la loi appelle « des options d’aménagement imposables au permis de construire ». Il s’agit de dérogations au PLU négociées au coup par coup, « pour créer de l’expérimentation architecturale, urbanistique et paysagère ». Cela peut permettre à une municipalité de concevoir de nouveaux quartiers ou de restructurer des quartiers anciens « en dépassant une interprétation rigoureuse du PLU ». Autrement dit, quand les promoteurs se font pressants et séduisants, le PLU peuvent être tourné. La loi Grenelle II rend « ces orientations d’aménagement et de programmation » obligatoires dans les PLU. Les élus qui ont une plus grande marge de manœuvre se gardent bien de protester. Ainsi va la dérégulation.
Le document graphique du PLU ou « zonage »
Il s’agit d’une carte de la commune divisant son territoire en plusieurs zones, jusqu’à la précision de la « parcelle cadastrale » afin d’être opposable, au « pétitionnaire » de construction ou de travaux :
– les zones « urbaines » (zones U) sont « les secteurs déjà urbanisés et les secteurs où les équipements publics existant ou en cours de réalisation ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter » ;
– les zones « à urbaniser » (zones AU) désignent « les secteurs à caractère naturel de la commune destinés à être ouverts à l’urbanisation » ; les « secteurs urbanisables immédiatement » (zones 1AU) « ont un assainissement existant, à la proximité immédiate de la zone U et une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter » ; si cette capacité est insuffisante, « l’ouverture est subordonnée à une modification ou à une révision du PLU » (zones 2AU) ;
– les zones « agricoles » (zones A) Ce sont « les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison de leur potentiel agronomique, biologique ou économique de terres agricoles ». Seules les installations nécessaires aux services publics et à l’exploitation agricole y sont autorisées.
– les zones naturelles et forestières (zones N). Ce sont « les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison de la qualité des sites, des milieux naturels, des paysages et de leur intérêt notamment du point de vie esthétique, historique ou écologique ».
– Le plan de zonage délimite aussi des secteurs particuliers, comme les espaces boisés classés ou les emplacements réservés, notamment pour la construction future d’équipements.
Le règlement du POS
Il décrit pour chaque zone définie dans les documents graphiques, les dispositions réglementaires applicables : « type d’occupation ou d’utilisation du sol interdites, type d’occupation ou d’utilisation du sol soumises à des conditions particulières, accès et voiries, desserte par les réseaux (eaux, assainissement, électricité…), caractéristique de terrains, implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques ; implantation des constructions par rapport aux limites séparatives, implantation des constructions les unes par rapport aux autres sur une même propriété, emprise au sol, hauteur maximum des constructions, aspect extérieur, stationnement, espace libre et plantations, espaces boisés classés, coefficient d’occupation du sol (COS) ». Certaines de ces dispositions sont obligatoires, d’autres facultatives.
Les compatibilités du PLU
« Le PLU doit respecter les consignes données par différents documents « de rang supérieur », élaborés par l’État ou d’autres collectivités territoriales ». Ce sont les documents suivants :
– toutes les lois, dont la loi montagne et la loi littoral ;
– la directive territoriale d’aménagement (DTA), de compétence étatique ;
– le schéma de cohérence territoriale (SCOT) mis en place par un établissement public regroupant les collectivités locales dans un périmètre donné ;
– le Programme Local de l’Habitat (PLH) ;
– le Plan de Déplacement Urbain (PDU) ;
– la Charte de Développement du Pays ;
– le Schéma d’Aménagement et de Gestion des Eaux (SAGE ou Schéma Directeur-SDAGE)
L’élaboration des PLU
Elle se déroule en plusieurs étapes bien distinctes, strictement codifiées, comportant plusieurs étapes de concertation :
– Le conseil municipal (ou communautaire) prescrit l’élaboration du PLU ou de sa mise en révision et définit les modalités de la concertation préalable ;
– La décision est notifiée au préfet, au président du conseil général, à l’EPCI chargé de la mise en œuvre du SCOT, à l’autorité organisatrice des transports, à l’organisme de gestions des PNR, aux communes limitrophes, et, s’il y a lieu, aux Chambres consulaires ;
– La décision est publiée par le préfet ;
– La phase des études préalables est engagée. Une très large concertation est mise en place (« recueillir les avis de la population venant nourrir la réflexion des urbanistes »). Les personnes publiques énumérées plus haut sont consultée. Le maire (le président de la communauté) peut aller au delà et consulter, par exemple, les associations compétentes dans les différents domaines touchés par le PLU.
– Deux mois avant l’arrêt de projet, un débat a lieu en conseil municipal (en conseil communautaire) sur les orientations générales ;
– Le conseil municipal (communautaire) arrête, par délibération, le projet de PLU ;
– Le projet est alors soumis aux personnes associées à son élaboration pendant un délai de trois mois.
– Le projet, auquel les avis sont annexés est soumis par le maire à « l’enquête publique », procédure elle aussi très codifiée ;
– Le projet, éventuellement modifié, est approuvé par délibération du conseil municipal communautaire);
– Le PLU approuvé est tenu à la disposition du public.
Le PLU constitue l’une des procédures légales les plus marquées par des préoccupations de démocratie participative, même si souvent l’intervention des citoyens et des associations est trop formalisée et limitée dans ses effets. L’enquête publique, en particulier, a fait l’objet de très nombreuses études de cas qui démontrent toutes la nécessité de la réformer pour la rendre plus participative.
Dans les communes non couvertes par un SCOT, le PLU devient exécutoire seulement un mois après sa transmission au préfet, si celui-ci n’a pas notifié à la commune (à la communauté) des modifications à apporter.
Mise à jour et modifications du PLU
La procédure « de mise à jour » est utilisée pour effectuer la transcription dans le PLU de « Servitudes d’utilité publique », comme le plan de prévention des risques, la protection des Monuments Historiques. Il n’y a alors pas lieu d’organiser une nouvelle enquête publique.
La modification, la révision simple ou la révision générale (« atteinte à l’économie générale du document ») du PLU sont au contraire soumises à enquête publique. La procédure est lourde (un ou deux ans) et ressemble à celle que nous avons décrite pour la première adoption.
Évolution des PLU
L’évolution des PLU est marquée par la volonté de mieux intégrer la nature et l’écologie urbaine. Depuis mai 2 011, l’État s’est engagé « à restaurer des milieux naturels et des continuités écologiques », y compris en ville, grâce aux « trames vertes et bleues », en « valorisant les friches industrielles et portuaires », en « restaurant et valorisant la nature en ville ». Ces ambitions louables n’ont guère été mise en œuvre jusqu’à présent, faute de crédits et de « la faible implication des acteurs » (C’est ce que dit l’État pour justifier des évaluations peu satisfaisantes). Le bilan souligne aussi « l’insuffisante prise en compte dans les PLU de la ressource en eau ».
Il semble évident que la réflexion collective plus large relative au PADD devrait précéder l’élaboration ou la révision d’un PLU, ce qui est loin d’être toujours le cas. « Les documents d’urbanisme sont révisés fréquemment pour permettre la construction d’espaces nouveaux. L’extension des territoires urbanisés n’est pas sans impact sur l’environnement. Le PLU qui a portant l’air très contraignant n’a pas du tout stoppé « l’étalement urbain ».
Se pose enfin, constamment « le problème de la hiérarchie des normes » notamment entre les PLU et les SCOT. Des clarifications seraient nécessaires dans ce domaine, mais il s’agit, une fois de plus, de surmonter la difficulté d’une mise en cohérence dans le respect de l’autonomie locale.
►Ce que dit le projet de loi.
Modification pour les communautés de communes (article 40)
Un article du code général des collectivités locales énumère les compétences que les communautés de communes « exercent de plein droit au lieu et place des communes membres pour la conduite d’actions d’intérêt communautaire ». Au 2°) de cet article il est indiqué « Aménagement de l’espace ». Le projet de loi se propose d’ajouter : Lorsqu’elle forme un ensemble de plus de 30 000 habitants, la communauté de communes est, de plein droit, compétente en matière de PLU » (Le projet signale une option possible à 20 000 habitants).
Un autre article du même code doit être mis en conformité avec cette proposition. Il dit que la communauté de communes est compétente « en matière d’aménagement de l’espace communautaire : SCOT, schéma de secteur, ZAC d’intérêt communautaire ». Le projet de loi se propose d’ajouter « Lorsqu’elle forme un ensemble de plus de 30 000 (20 000 ?) habitants, la communauté de communes est, de plein droit, compétente en matière de PLU ».
Application de cette décision
Le projet de loi poursuit :
« Les communautés de communes de plus de 30 000 (20 000 ?) habitants existant à la date d’entrée en vigueur de la présente loi et qui ne sont pas compétentes en matière de PLU le deviennent de plein droit le premier jour du sixième mois suivant la publication de la présente loi. Toutefois, par dérogation à l’alinéa précédent, les communes ayant engagé une procédure d’élaboration d’un PLU et ayant tenu le débat sur les orientations de PADD avant l’entrée en vigueur de la présente loi, peuvent rester compétentes jusqu’à l’approbation de ce plan. Elles peuvent également rester compétentes jusqu’à l’approbation de la révision, de la modification ou de la mise en compatibilité d’un PLU engagée avant l’entrée en vigueur de la présente loi. Si l’approbation mentionnée à l’alinéa précédent n’intervient pas dans un délai de trois ans à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi, les communautés de communes deviennent de plein droit compétentes en matière de PLU ».
Modification pour les communautés d’agglomération
Un article du code général des collectivités territoriales énumère les compétences des communautés d’agglomération et, parmi elles ; « en matière d’aménagement de l’espace communautaire : SCOT, schéma de secteur ». Le projet de loi propose simplement d’ajouter « PLU ».
Application de cette décision
Le texte est exactement le même que pour les communautés de communes.