Le citoyen, l’habitant et le vivant au centre de l’action publique !
J’ai ouvert l’édition 2025 de la journée des territoires le 1er décembre dernier en rappelant les termes du manifeste de l’Unadel adopté 2 ans plus tôt dans la même salle à Paris. Petit résumé :
« Lorsque les femmes et les hommes considèrent leur territoire comme un bien commun, dans le respect de la terre et du vivant, en s’appuyant sur la culture, l’éducation populaire et de nouveaux rapports économiques, plus sociaux, plus solidaires, alors ils sont fidèles aux principes, aux valeurs, à l’histoire et aux expérimentations du développement local. Ils donnent à voir qu’un autre développement est possible.
Fondé sur la coopération, la solidarité et le respect du vivant, le développement local s’appuie sur la diversité des acteurs d’un territoire, qu’il soit urbain ou rural, pour construire des solutions adaptées aux enjeux contemporains : crise climatique, tensions sociales, perte de biodiversité.
Il valorise l’engagement citoyen, la démocratie participative et la capacité des habitants à inventer des modèles économiques plus sobres, plus inclusifs et plus solidaires. Les initiatives locales de toute nature, illustrent la force de l’action collective, particulièrement dans l’adaptation et la transformation en situation de crise.
Face aux défis contemporains nous appelons à renforcer la décentralisation, à soutenir l’ingénierie locale de la transformation et de la conduite du changement, les réseaux du développement local et à promouvoir la coopération entre élus, citoyens, associations et acteurs économiques.
Donner envie de faire territoire commun
A quelques semaines des prochaines municipales, ce message est plus que jamais d’actualité. Nous avons la responsabilité collective de donner envie de faire territoire commun dans les quartiers, les hameaux, les communes et les intercommunalités en replaçant le citoyen, l’habitant et le vivant au centre de l’action publique.
Est-il encore possible aujourd’hui de bâtir une société plus juste, plus résiliente, plus durable et … plus démocratique ? Sur quoi pouvons-nous réellement agir ?
Un besoin urgent de changement
Les attentes exprimées par la société civile, les réseaux associatifs et les institutions témoignent d’un besoin urgent de changement.
Face à l’essoufflement, voire l’impuissance des modèles centralisés, la question se pose :
Et si le changement, les transformations sociales et sociétales venaient du local ?
Et si les initiatives citoyennes, les expérimentations portées par des collectivités locales, des collectifs citoyens ou des associations dans les campagnes comme en ville, permettaient de redonner de la confiance et de l’espoir. Alors que nos valeurs républicaines et démocratiques semblent vaciller et que la promesse républicaine est menacée, le local peut-il réveiller la démocratie ?
Bien sûr l’addition des petites solutions ne transformeront pas le pays en profondeur. Mais quand on va au-devant de nos concitoyens, qu’on leur demande leur avis et qu’on les écoute, ils ne sont pas muets : ils disent, ils pensent et ils agissent. Ils ne sont pas tous atteints de sinistrose et pourtant ils ne croient plus vraiment à l’avènement d’un grand soir de gauche ou de droite, pas même de droite extrême, en dépit des promesses des uns ou des autres, mais ils agissent.
Et les territoires écoutés en 2025 et représentés lundi dernier à la halle Pajol, nous ont démontré que face à l’adversité (la tempête Alex dans la vallée de la Roya, un projet d’aménagement menaçant les paysages et la biodiversité dans le Vercors, un territoire vosgien qui se vide de sa jeunesse sans réelle alternative autour de Neufchâteau, des Collectivités et/ou des collectifs citoyens, des élus, des fonctionnaires et/ou des militants associatifs des salariés, des retraités, des indépendants, des chercheurs, des étudiants ou des enseignants, s’engagent et participent aux transformations écologiques et sociales de leur bassin de vie. Les mots valise, transitions ou bifurcations ne signifient pas forcément les mêmes choses pour eux, mais ils acceptent de se laisser interpellés par les défis du réchauffement climatique au moins autant que par les dysfonctionnements de notre démocratie nationale et parfois aussi de nos gouvernances locales.
L’Unadel accompagne les dynamiques locales depuis plus de 40 ans et fait le constat de plus en plus de coopération entre acteurs à toutes les échelles de territoire. On est passé de la compétition entre territoires à la coopération et à l’engagement. Bien sûr on ne peut pas généraliser, mais la France vue par les médias n’est pas celle que nous rencontrons depuis une quinzaine d’années, à l’occasion des écoutes territoriales que nous déployons avec une méthode de plus en plus rôdée, bien que perfectible évidemment.
Cette année 2025 nous aura permis d’aller au-devant de 8 territoires différents dans plusieurs régions de France. Cela n’aurait pas été possible sans le soutien de la Fondation de France et de l’ANCT et sans l’engagement de ceux qui nous ont accueillis, collectivités, collectifs citoyens et laboratoire expérimental de la ruralité, ni sans les 70 écoutants mobilisés qui ont réalisé 400 entretiens individuels ou collectifs. Plus de 200 personnes ont participé au restitution-miroir organisées quelques semaines après les écoutes pour enrichir par l’échange les grands enseignements tirés de ces entretiens de terrain.
Ils doivent être accueillis avec prudence et humilité parce qu’ils sont d’abord tirés des mots entendus et de l’expression de ceux qui ont été rencontrés sans être pleinement représentatifs de la population du territoire. Pour autant j’en retiens la richesse de la diversité et de l’implication des personnes rencontrées et la variété des situations des territoires et des expérimentations qui y sont proposées.
Il y a beaucoup d’engagement dans ce pays et c’est une force irremplaçable
Les initiatives locales foisonnent dans des domaines variés : alimentation, culture, transports, énergie, santé, habitat, mobilités, travail, tourisme. Elles tissent de nouveaux liens et méritent d’être soutenues et valorisées. Renforcer le pouvoir d’agir local, c’est promouvoir l’écoute, le dialogue, le respect de l’autre, la transparence et la coopération entre tous les acteurs.
À l’approche des élections municipales de 2026, qu’en est-il du besoin et du désir d’engagement ?
La participation électorale s’effrite, tandis que les démissions d’élus se sont multipliées depuis 2020, révélant la nécessité de repenser la gouvernance locale. Les lois de décentralisation ont permis des avancées, mais leurs limites sont aujourd’hui évidentes.
Il nous faut construire ou consolider une démocratie d’implication et de responsabilité partagée.
A partir d’un texte martyr mis en travail pendant la journée des territoires et retravaillé dès le lendemain nous vous proposons dans cette lettre mensuelle, l’adresse de l’Unadel aux candidats et plus globalement aux habitants de ce pays pour qu’ils apportent leur brique à la construction d’une démocratie du vivre et du faire ensemble territoire commun.
Vous pourrez aussi découvrir d’autres contributions pour enrichir la réflexion : les 8 propositions de Pierre Calame pour une décentralisation qui redonne du pouvoir d’agir citoyen et la contribution de Jean-Claude Mairal sur l’histoire et le devenir de la démocratie.
Habiter un territoire ce n’est pas seulement y résider, c’est aussi participer à sa transformation. A 100 jours des municipales, ensemble, dans nos bassins de vie, écrivons un récit territorial porteur de sens et d’enthousiasme.
Faisons du local le moteur d’une démocratie plus désirable qui relie, qui accueille les femmes, les hommes et les idées, qui invente des solutions et nous réconcilie avec le vivant sous toutes ses formes tout en nous permettant de traverser les crises, y compris démocratiques, sans les subir.
Je profite de ce dernier édito de l’année pour vous souhaiter à toutes et tous de joyeuses fêtes.
Claude Grivel,
Président de l’UNADEL

